Attraction première pour les amateurs de safari, les rhinocéros blancs (Ceratotherium simum) de la Réserve de Faune d’Abokouamékro sont des vestiges de la belle épopée qu’a vécu la Côte d’Ivoire.
Un projet titanesque
Parmi les grands chantiers initiés par feu le président Félix Houphouët Boigny figure en bonne place la réalisation d’un paradis touristique aux portes de la capitale politique, à environ 33 km de Yamoussoukro.
A la différence des autres aires protégées de la Côte d’Ivoire, la réserve, d’une superficie de 20 430 ha, devait être entièrement clôturée. La faune locale n’étant pas assez riche, un projet d’introduction d’animaux était prévu.
Le vieux* voyait grand. Des animaux exotiques des grandes savanes d’Afrique du Sud tels que des zèbres, des gnous, des springboks, des rhinocéros étaient même annoncés.
Après maints remous, c’est finalement 7 230 ha qui sont clôturés de grillages de fer soutenus par des potelets en béton en 1988.
757 animaux appartenant à 16 espèces sont introduits progressivement jusqu’en 1993, année de la dernière vague. Ces animaux ont été capturés dans les Parcs Nationaux de la Comoé (Bouna)* et de la Marahoué (Bouaflé)*. Concernant la faune exotique, deux espèces sont finalement venues d’Afrique du Sud, il s’agit de 6 éléphants et 5 rhinocéros blancs.
Plus de 4 milliards de FCFA ont été investis dans ce projet titanesque.
Un héritage en pointillé…
Avant 2002, la réserve recevait en moyenne plus de 20 000 visiteurs par an, dont plus de 90% de touristes étrangers, venus visiter la ville de Yamoussoukro et sa basilique.
Les amateurs de safari étaient parfaitement satisfaits de la visite. La végétation à dominance herbacée, le magnifique relief dominé par la colline des ambassadeurs et l’abondance d’animaux facilement visibles fascinaient le visiteur.
Cependant, de violentes tensions entre les gestionnaires de la réserve et les populations des sept villages périphériques, à cause des dégâts répétés des animaux de la réserve sur leurs cultures ont conduit à la destruction de ce joyau touristique.
En effet, certains animaux, surtout les éléphants, ayant réussi à se frayer un passage dans la clôture constituée de grillage et de potelets en bétons, s’attaquaient aux cultures environnantes. Ces conflits les hommes et la faune ont finit par exacerber les populations riveraines.
Résultats des courses: toute la clôture de la réserve est détruite en 2002, au grand plaisir des braconniers, qui n’en demandait pas moins.
Aujourd’hui, ce potentiel faunique a fortement diminué malgré les patrouilles de surveillance. Les rhinocéros blancs, emblèmes de la réserve, au nombre de sept, sont en fuite depuis avril 2002.
De nombreuses recherches ont permis de localiser, en 2010, quatre rhinocéros en compagnie d’un troupeau de bœufs dans le village de Brou Ahoussoukro (préfecture de Bocanda, au centre du pays). Ceux-ci auraient menacé de charger des paysans en partance pour les travaux champêtres.
Les services forestiers de Bongouanou ont également signalé la présence de deux rhinocéros dans la sous-préfecture de M’Batto, plus précisément aux alentours du village de N’Drikro (non loin de la zone Bocanda).
Ces animaux de par leur simple présence ont semé la panique au sein de la population qui croyait avoir affaire à des monstres ou des génies, puisque ces animaux ne sont pas originaires de la région et sont donc inconnu des villageois.
Ces rhinocéros, principales curiosités dans la réserve, courent le risque d’être abattus ou braconnés, ce qui serait une grande perte pour le tourisme ivoirien.
On ne connait pas précisément leur effectif actuel. La principale solution envisagée pour l’instant est leur capture et leur réintroduction dans la réserve, à l’intérieur des enclos provisoires, en attendant la réhabilitation de la clôture.
Espérons que tout sera mis en œuvre pour éviter l’extinction de cette espèce exotique qui, au fil des années, s’est bien acclimaté à son nouveau territoire.
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