Voilà déjà quelques mois que je suis parti d’Alexandrie, cette belle ville balnéaire et cosmopolite. Alexandrie est l’une des principales villes touristiques d’Egypte avec ses grands complexes hôteliers luxueux et les kilomètres de plages aménagées pour les balades le long de la Méditerranée. En termes de sites touristiques anciens, on trouve dans celle belle cité la colonne de Pompée mais aussi les catacombes de Kom Al Shaqafa datant du 1er et 2e siècle après J-C et considérées comme la plus importante nécropole romaine en Egypte. Ces catacombes comprennent trois niveaux de chambres et de tombes creusées dans la roche, jusqu’à 35m de profondeur. On peut visiter également le fort Quaitbay construit sur les ruines et avec les blocs antiques du phare d’Alexandrie, septième des sept merveilles du monde antique. De nombreux autres sites et attraits touristiques tiennent les visiteurs en haleine pendant le parcours de cette ville (Bibliotheca Alexandrina*, El Muntazah Palace, etc.).

Tout cela fait bien rêvasser. Mais en réalité, vivre à Alexandrie ou plus généralement en Egypte n’est pas toujours facile surtout lorsqu’on a la peau « chocolatée* », comme on aime bien le dire en Côte d’Ivoire. Les premiers contacts avec l’Égyptien lambda dans notre quartier d’habitation à Khaled Ibn Walid, en plein cœur d’Alexandrie, m’ont négativement marqués. Des rires moqueurs, des cris, des mots arabes dont les significations m’étaient à cette époque-là inconnus étaient mon quotidien. Certains plus teigneux et souvent les enfants ne cessent de t’harceler et te demander l’heure en montrant leurs poignets du doigt, histoire de te dire « regarde ta peau » (on me l’a expliqué bien plus tard car ça devenait saoulant cette affaire de demande d’heure intempestive).
Soudani* ? Where are you from? sont les interrogations récurrentes des Égyptiens qui croisent ton chemin.
Certains jours, tu peux te taper une bonne centaine de ces questions, surtout si tu fais quelques courses dans les boutiques. Certains veulent vraisemblablement faire connaissance, mais pour la plupart c’est purement et simplement pour la raillerie. Après quelques mois, on s’habitue vite à ces stupidités. Maintenant quand je me balade, je ne réponds plus à ces provocations.
Au milieu de tout ce brouhaha arabo-anglais, un mot revient constamment : « samarah* ». C’est un mot difficile à définir. Pour certain ça veut dire « noir, nègre », pour d’autres « africain ». Il faut noter que les quelques amis égyptiens francophones que nous avons à l’université sont toujours un peu gênés quand il s’agit de définir ce mot.
« Ce n’est pas un mot méchant en fait, mais c’est difficile à définir exactement en français », balbutient-ils.
L’Egypte est un Etat très policier avec des lois totalement différentes de mon pays d’origine. On stresse souvent devant certaines situations, mais on prend toujours la vie du bon côté. Voici un pays où l’on est gêné de prendre l’ascenseur avec une femme seule. Lorsqu’il y a une Égyptienne que je ne connais pas dans l’ascenseur de l’immeuble, désolé, je préfère attendre le prochain. Cela peut faire rigoler, mais mieux vaut prendre ses précautions. Je préfère me prémunir de la lapidation. On ne sait jamais, si elle crie par mauvaise foi c’est la catastrophe.
Je reprends donc le chemin de l’Université Senghor d’Alexandrie pour la deuxième année du master dans trois semaines. Plusieurs amis étudiants ont choisi l’Europe ou d’autres pays d’Afrique dont ils ne sont pas originaires pour leurs stages de master, moi j’ai foncé droit au pays pour me re-tropicaliser après avoir vécu une année de galère culinaire. Des épices et senteurs qui ne me conviennent pas, trop sucrés ou souvent trop gras, les mets égyptiens n’arrivent toujours pas à séduire mon palet. A mon arrivée au pays, les repas bien arrosés m’ont remis d’aplomb. Sujet tabou, l’alcool n’a pas bonne presse dans ce pays musulman à plus de 95%. Heureusement, avec mes colocataires, nous arrivons souvent à nous procurer dans les espaces « drinkies* » agréés de la ville, quelques canettes de bière que nous savourons incognito dans notre appartement.

Encore trois semaines pour me gaver des derniers nectars du pays et bouffer le maximum de garba*. Je prépare d’ores et déjà 23kg de provisions « made in Côte d‘Ivoire » et une bonne bouteille de « brûle en moi* », bas les côcôs* ! Quelques amis téméraires sont déjà arrivés en avance à Alexandrie, moi je vais griller le temps jusqu’aux dernières secondes. Restez connecté, bientôt le résumé en couleurs du retour des « samarah » au pays des pharaons, car les histoires improbables à relater, il y en a toujours avec ces « samarah » originaires de tous les pays francophones d’Afrique noire.
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